Le gouvernement s’attaque à la réforme des retraites, le fameux serpent de mer évoqué régulièrement pendant les quinquennats successifs et qui évolue à la marge depuis une vingtaine d’années. Après le report de présentation début janvier 2023, un point s’impose !
L’âge de la retraite est un sujet sensible, très sensible. C’est la raison pour laquelle, rares sont les courageux ou téméraires à insister. Même si les économistes ne sont pas tous d’accord sur la pertinence de la réforme des retraites, voici ce qui se profil.
Commençons par un petit rappel historique très bref vu le peu d’appétence des dirigeants à bousculer le système en place.
1945, le régime général de la Sécurité sociale voit le jour sous le gouvernement de Gaulle avec un âge légal de départ à la retraite de 65 ans. Les premiers régimes spéciaux baissant l’âge de la retraite pour certains métiers se mettent en place dans la foulée.
1983, François Mitterrand fait passer l’âge de la retraite à 60 ans. Sa demande d’offrir une retraite à 55 ans pour les femmes a été rejetée.
2010, Nicolas Sarkozy fait modifier les dispositions. L’âge légal passe à 62 ans pour les personnes nées en 1955 et plus, les régimes spéciaux continuent à exister, dans les cas de carrière longue et de pénibilité. Dans le même temps, les trimestres nécessaires pour le taux plein passent à 166 trimestres. Et l’augmentation progressive, depuis une loi de 2014, du nombre de trimestres pour avoir le taux plein (43 ans en 2035).
L’impact démographique
Chacun en est conscient, les choses ont bien changé depuis les 60 dernières années, nous vivons plus âgés… Ainsi, certains Européens adaptent leurs systèmes. Les Pays-Bas, la Slovaquie et l’Italie ont adopté pour les prochaines années un système selon lequel l’âge légal augmente de 8 mois pour chaque année d’allongement de l’espérance de vie.
La Suède quant à elle permet de prendre une pension à partir de 62 ans, mais l’âge de départ est flexible. Le taux de natalité joue également un grand rôle, plus il est faible, plus le système de retraites se fragilise. Enfin autre élément à prendre en compte, le taux d’activité des plus de 50 et 60 ans.
La retraite par répartition
Et voilà où le bât blesse. Enfin, seulement depuis quelques années, car ce système a fort bien fonctionné pendant des décennies. Aujourd’hui, le poids des non-actifs et en particulier des retraités devient de plus en plus lourd pour la population active. Ce système n’est pas du tout spécifique à la France. De très nombreuses économies européennes disposent de la répartition, couplée à un système par capitalisation.
Concrètement…
Mais que se passe-t-il vraiment aujourd’hui ? En France, la durée de cotisation varie aujourd’hui entre 41 et 43 ans. Selon la Sécurité sociale, les Français partent en moyenne à la retraite à 62 ans et 10 mois. Une tendance de recul de l’âge qui se poursuit depuis 2018 (où l’âge moyen était de 60 ans). Si l’on enlève le phénomène des retraites anticipées, l’âge moyen monte à 63,1 ans.
Comment évolueront les retraites ?
L’idée est de repousser l’âge de départ à la retraite, pour arriver à 64 ans en 2027, puis éventuellement à 65 ans d’ici à 2031/2032, au lieu de 62 ans actuellement. Il s’agit de mettre en place un relèvement progressif de la durée de cotisation, à hauteur de 4 mois par an.
Les premiers concernés par la réforme devraient être les personnes nées le deuxième semestre de 1961.
Une clause de « revoyure » pourra être proposée en 2027/2028 pour repousser l’âge légal de la retraite. L’exécutif s’engage donc à examiner les dispositions légales ou réglementaires et à déterminer si l’âge légal de la retraite (64 ou 65 ans) est dépassé. Notre régime de retraite est une exception, mais nous nous dirigeons vers les règles de nos voisins européens. Le gouvernement réfléchira également à l’accélération de la Réforme Touraine de 2014, qui prévoit entre autres un allongement de la durée de cotisation et une réaffirmation du respect du principe de la retraite par répartition. Un trimestre supplémentaire tous les trois ans sera nécessaire pour une carrière complète afin de percevoir sa retraite à taux plein.
Longue carrière et pénibilité : à quel âge partir ?
Les réformes ne doivent pas s’appliquer à tout le monde, car des facteurs tels que les carrières longues et la difficulté de certains emplois doivent être pris en compte. Nous n’avons pas encore assez de détails, mais une longue carrière ou un cas difficile pourrait vous permettre de prendre votre retraite avant d’atteindre l’âge légal de la retraite. « Il faut prendre en compte les carrières longues, les questions d’invalidité et de pouvoir prendre en compte la réalité des métiers et des tâches pour avoir un système juste » a déclaré Emmanuel Macron.
Fin des régimes spéciaux ?
L’exécutif veut supprimer les régimes spéciaux comme la RATP ou les régimes spéciaux au sein de l’industrie électrique et gazière (IEG). En conséquence, les nouveaux entrants ne pourraient plus bénéficier des avantages précédemment accordés (la « clause de grand-père », c’est-à-dire que seuls les nouveaux entrants dans le système s’appliquent, et non ceux dans le système existant).
Une pension à 1 200 € ?
La réforme des retraites devrait également affecter le niveau minimum des pensions. Emmanuel Macron a déclaré vouloir instaurer une retraite d’au moins 1 100 €. Cependant, après une réévaluation et une réflexion avec les partenaires sociaux sur l’augmentation des retraites, Elisabeth Borne a annoncé que le minimum vieillesse serait plus élevé que prévu, avec un montant net de 1 200 €.
Chômage des seniors, emplois et retraite
L’un des objectifs de la réforme et de l’augmentation du temps de travail est de maintenir les seniors dans l’emploi et de réduire significativement le taux de chômage des salariés français de ce segment. Sur le cumul d’emplois post-retraite, le candidat Macron a déclaré vouloir inciter les seniors à travailler à la retraite en leur permettant d’augmenter leurs droits cotisables (ce qui n’est pas le cas dans le régime actuel).
Alors, pour ou contre ?
Votre avis est fait et rien ne vous en fera démordre. Le fait est que peu importe les décisions prises, une grande partie des Français ont d’ores et déjà pris acte de la nécessité de prévoir leur retraite au-delà du système officiel. La bonne stratégie est souvent d’anticiper (comme souvent).
La preuve en est que les Français continuent à épargner, y compris en ces moments d’inflation croissante, d’incertitude. Ils essaient également dès qu’ils le peuvent financièrement d’acheter un bien immobilier, si possible leur résidence principale. Ils sont très nombreux à signer un Plan Épargne Retraite, un produit qui remporte un franc succès parmi la population active. Il y a les paroles et les actes. Et au niveau des actes, les Français prouvent qu’ils anticipent des changements !
Rappel : les âges de la retraite en Europe au 1er janvier 2022
Hormis régimes spéciaux, et régimes femmes pour certains pays
- 67 ans : Allemagne, Danemark. Pays-Bas, Portuga
- 66 ans : Irlande
- 65 ans : Autriche, Belgique, Bulgarie, Chypre, Croatie, Espagne, Finlande, Hongrie, Italie, Luxembourg, Malte, Pologne, Roumanie, Slovénie, Lituanie (64 et 4 mois)
- 63/64 : Estonie, République Tchèque, Slovaquie
- 62 ans : France, Grèce, Suède